Une EEE ou espèce invasive est une espèce exotique non originaire du milieu introduite par l’Homme, volontairement ou non, qui menace les écosystèmes au sens large. C’est à dire que la présence d’une espèce invasive aura un effet néfaste sur les habitats, les espèces ainsi que sur les interactions entre les espèces d’un écosystème. De plus, les services écosystémiques, socio-économiques et sanitaires initialement rendus par le milieu sont impactés négativement par la présence d’une espèce exotique envahissante.
Comment devenir une espèce envahissante ?
Toutes les espèces introduites sur un territoire ne deviennent pas invasive, fort heureusement. La règle des three tens rule de Williamson proposée en 1996 part du postulat que sur 1000 espèces importées par l’Homme, 100 seraient introduites, 10 arriveraient à se reproduire et 1 deviendrait envahissante. A première vue cela semblerait peu… Et pourtant! 1 seule espèce dans un milieu suffit à faire des dégâts dans l’écosystème.
Les écosystèmes les plus fragiles sont les plus enclins à être colonisés. En effet, les perturbations écologiques des habitats (artificialisation, anthropisation des milieux) diminuent les capacités de résistance et de résilience des écosystèmes ce qui est une porte d’entrée pour les espèces invasives. Enfin, ces milieux modifiés ont souvent des niches écologiques vacantes ainsi qu’un faible nombre d’espèces ce qui contribue à la déstabilisation de l’écosystème. Il est à noter que certaines EEE, notamment les végétaux, ont la particularité de se mettre en phase de latence dans un milieu, et, au moment propice à leur développement, soit à une perturbation ponctuelle de l’équilibre de l’écosystème, de croitre et d’entamer le processus de colonisation, voir ci-dessous ©UICN France, 2015. Les espèces exotiques envahissantes sur les sites d’entreprises. Livret 1 : Connaissances et recommandations générales, Paris, France, 40 pages
Le succès de l’invasion d’une EEE est multifactoriel et difficilement généralisable et prédictif. Néanmoins, des traits communs peuvent se dégager concernant leur biologie. En effet, les EEE ont globalement :
- Une forte capacité de reproduction, soit nombreuses et répétitives.
- Ce sont des espèces capables de s’acclimater rapidement aux habitats disponibles, aux ressources du milieu,… Elles sont souvent généralistes.
- Les EEE ont une croissance rapide et importante. Elles se dispersent facilement.
- Les espèces invasives s’adaptent aux perturbations et sont souvent plus compétitives que les espèces autochtones. Ce qui leur permet de prendre une partie de leur niche écologique et de souvent les exclure de l’écosystème.
EEE : les conséquences sur les milieux
Les espèces exotiques envahissantes sont la deuxième cause d’extinction des espèces à l’échelle planétaire. Elles ont une influence sur la biodiversité en :
- Modifiant la diversité spécifique du milieu par la compétition et la prédation. Les EEE exercent une pression sur les espèces autochtones ce qui peut avoir comme conséquences de les faire disparaitre de l’écosystème. Parfois, la présence des espèces invasives permet de stimuler la diversité du milieu et de sélectionner les populations autochtones suffisamment compétitives pour limiter l’invasion des EEE.
- S’hybridant avec des espèces autochtones. En effet, la reproduction entre une EEE et une espèce autochtone peut se produire et modifier la diversité génétique de l’écosystème. Ce point est davantage problématique si l’espèce autochtone est très localisée et que les hybrides prennent petit à petit la place de l’espèce indigène dans l’écosystème. C’est le cas notamment des souches de truites fario domestiques qui ont été relâchées dans le milieu par rempoissonnement et qui se sont reproduites à grande échelle avec les souches de truite fario sauvages. Ainsi, les hybrides de ces deux espèces sont majoritaires dans les rivières françaises au détriment de la truite fario sauvage qui disparait du milieu.
- Propageant des parasites et des pathogènes. Il s’agit ici d’apporter dans un milieu vierge de certaines maladies, des problèmes sanitaires inconnus jusqu’alors. Les espèces indigènes ne sont pas équipées pour combattre les pathogènes importés par des EEE souvent porteurs sains. C’est le cas par exemple pour les populations d’écrevisses. En France les écrevisses autochtones (l’écrevisse des torrents, l’écrevisse à pattes rouges et l’écrevisse à pattes blanches) sont impactées par une maladie mortelle : la peste des écrevisses qui est une maladie mortelle véhiculée par les écrevisses américaines.
D’une manière générale, l’introduction d’une EEE dans un écosystème induit une banalisation des espèces en réduisant le nombre d’espèces présentes (diversité spécifique), les interactions entre les espèces du milieu. Dans les cas les plus problématiques, la disparition des espèces autochtones ainsi que la modification de la structure même de l’écosystème qui perd alors ses fonctions initiales.
EEE et écosystèmes aquatiques
Pour les milieux aquatiques on parle également d’espèces susceptibles de causer des troubles biologiques. Aujourd’hui, la perche-soleil, le poisson-chat, le ragondin, la grenouille taureau, les écrevisses américaines entre autres sont interdits d’introduction dans le milieu naturel, selon l’arrêté du 30 juillet 2010 du code de l’environnement.